Contexte historique et contemporain du soutien à Israël au sein de la droite française
Le conflit israélo-palestinien, complexe et multiséculaire, revêt en France une dimension idéologique forte qui semble transcender les clivages politiques traditionnels. Depuis plusieurs décennies, Israël et le sionisme ont ainsi souvent bénéficié d’un soutien marqué dans les cercles politiques français, particulièrement à droite.
L’ascension des figures politiques telles qu’Éric Zemmour et Jordan Bardella , les chaînes d’information comme CNews et les émissions de Sud Radio illustrent aujourd’hui un virage pro-israélien de plus en plus fort, par opposition à une gauche qui se fait « pro-palestinienne » sans bien comprendre pourquoi.
Ces personnalités et organisations, souvent unies par une ligne nationaliste, mettent en avant un discours qui soutient Israël en tant qu’allié dans la lutte contre ce qu’ils perçoivent comme un ennemi, l’Islam. De ce fait, le sionisme devient pour la droite non seulement un allié politique, mais aussi un symbole de lutte contre un ennemi commun, l’islamisme, ce qui a cristallisé des positions de plus en plus radicalisées
Les postures adoptées par des personnalités comme Zemmour ou des animateurs de CNews soulignent une sympathie de plus en plus forte pour l’État hébreu : un soutien souvent rationalisé en tant que partie intégrante d’une vision prétendument civilisationnelle, opposant une « démocratie israélienne » à un monde arabe et musulman perçu comme hostile. Cependant, cette vision ignore souvent la réalité de l’occupation militaire et des violences subies par le peuple palestinien.
De plus en ce qui concerne la droite chrétienne, celle semble totalement ignorer le triste sort que connaît Jésus en vertu des textes talmudiques, alors que l’Islam fait de lui un des principaux messagers de Dieu…Mais contentons nous de raisonner ici sur le plan politique
Le sionisme et la découverte du « racisme antiblanc » : une nouvelle arme idéologique ?
Un opportunisme politique
La notion de « racisme antiblanc », introduite dans les débats publics en 2005, a marqué un tournant dans la rhétorique de certaines personnalités politiques et intellectuelles, et a largement favorisé le rapprochement entre les mouvements de droite et les idées sionistes. Des figures telles que Bernard Kouchner, Alain Finkielkraut, Eli Chouraqui et des organes de diffusion comme Radio Shalom en furent les premiers artisans, amalgamant en un même racisme antiblanc la haine francophobe et l’antisémitisme.
Cette intelligentsia commence à cette époque à dénoncer la marginalisation des Blancs au sein d’une société française, une idée qui a trouvé écho chez certains segments de la droite, mais aussi dans les cercles sionistes. Soudainement, des mouvements comme Hachomer Hatzaïr qui jusqu’alors faisaient fi de la situation du français de souche, lançaient un appel dénonçant les « ratonnades anti-blanc » [1]
Ce racisme francophobe et antiblanc fut pourtant dénoncé depuis des décennie par divers mouvements de droite, à commencer par le Front National, cependant que les mouvements et intellectuels sionistes persistèrent à l’ignorer (voire à remettre en question son existence même) jusqu’à cette fameuse tribune de 2005
Quand le sionisme et l’extrême droite folklorique se tendent la main
Ce concept de « racisme anti-blanc » s’est donc rapidement amalgamé avec d’autres formes de discours, notamment ceux liés à l’antisémitisme et à l’antisionisme. En effet, une partie des intellectuels et mouvements sionistes, qu’ils soient juifs ou non, ont adopté une stratégie consistant à associer antisionisme, antisémitisme et francophobie, présentant ces attitudes comme les facettes d’une même hostilité envers les valeurs françaises et occidentales.
Cette approche a rencontré un écho rapide et notable au sein de l’extrême droite française, qui a largement repris ce discours en amplifiant ses messages. Un exemple emblématique de cette dynamique fut l’article intitulé « Juifs et Gaulois : la paix des braves »[2], publié par le mouvement identitaire Terre et Peuple en 2007, appelant à une solidarité entre Juifs et Français de souche contre les communautés perçues comme des « ennemis communs ». L’année précédente, la Ligue de Défense Juive assurait la sécurité de Marine Le Pen lors du défilé en hommage à Hilan Halimi assassiné par une bande ethnique ; en 2018, le fait se reproduit dans le cadre de la marche pour Mireille Knoll, morte dans les mêmes circonstances dramatiques
La délinquance/criminalité qui découle d’une immigration incontrôlée en cours depuis les années 80 a été l’argument principal du rapprochement entre la droite, droite nationaliste y compris, et les personnalités ou structures sionistes. Quelques manipulations idéologiques et sémantiques suffirent par la suite à remplace le délinquant ou criminel immigré par « le musulman » ou L’islam comme ennemi commun à abattre
Le racisme anti-blanc : une réalité qui doit être combattue et non instrumentalisée
Il est indéniable que le racisme anti-blanc existe en France et que de nombreux Français d’origine européenne en sont victimes. Ce phénomène, longtemps ignoré ou minimisé, se manifeste par des discriminations, des agressions verbales et parfois physiques à l’encontre des individus perçus comme « Français de souche ». Pour ces personnes, cette expérience de discrimination est vécue comme une remise en cause de leur légitimité et de leur place dans la société française dont ils sont les héritiers, une réalité aggravée par un sentiment d’abandon par les autorités.
Il est ainsi impératif de rappeler que les français, « peuple européen de race blanche, de culture grecque et latine et de religion chrétienne » selon les termes du Général De Gaulle, incarnent l’identité française autochtone : les menaces qui pèsent sur lui doivent ainsi non seulement être combattues en priorité, mais ne doivent pas être confondues avec les problématiques d’une minorité quelle qu’elle soit.
Il convient ainsi de refuser cette instrumentalisation des malheurs qui accablent la population français de souche par des intérêts communautaires ou politiques. L’Etat doit désormais sacraliser la légitimité des français sur le propre sol en affirmant son identité et en garantissant sa sécurité
Une droite européenne islamophobe et pro-israélienne
Le choc des civilisations comme moteur du sionisme de droite
Aujourd’hui, les partis de droite et d’extrême droite en France, comme dans une grande partie de l’Europe, sont mus par une « islamophobie émotionnelle ». Celle-ci les pousse à voir en Israël un partenaire stratégique, non seulement sur le plan politique, mais aussi civilisationnel.
Ce sentiment de solidarité est largement fondé sur la crainte et la méfiance envers les populations immigrées d’origine maghrébine et musulmane en général, qui sont souvent associées bon gré mal gré aux problématiques de sécurité. Le soutien à Israël devient alors un symbole de soutien aux valeurs occidentales et une affirmation d’une identité de plus en plus confuse dans l’esprit de ceux qui s’en font les défenseurs – en témoigne la revendication d’une culture “judéo-chrétienne”, terme oxymorique s’il en est.
Dans cette perspective, les nuances disparaissent. Aux yeux de cette droite, l’ennemi perçu est souvent un amalgame de l’immigré maghrébin et du combattant palestinien, tous deux étant perçus comme des « menaces » musulmanes. L’Histoire du conflit israélo-palestinien est ainsi réduite à un simple affrontement civilisationnel – bien que la qualité de « civilisation » accordée à l’occident moderne puisse être discutée.
L’Europe fait face à une menace démographique/ethnique et non pas religieuse
Cela occulte bien entendu la réalité du calvaire vécu par les Palestiniens, victimes d’une colonisation militaire violente condamnée à plusieurs reprises par l’Organisation des Nations Unies. Quelles que soient les actions du Hamas, il reste important de rappeler que le peuple palestinien subit depuis plusieurs décennies un système d’occupation qui entrave sa liberté et met en péril ses droits fondamentaux.
Mais la doctrine du choc des civilisations revêt une autre facette en ce qui concerne la situation européenne.
Transformer l’immigration, qui est pour l’Europe une menace ethnique et démographique, en un combat religieux à mener contre l’Islam est d’un intérêt évident pour Israël et le sionisme en général : s’assurer le soutien des occidentaux, celui des gouvernements autant que des partis nationalistes d’opposition, dans leur entreprise de domination au Moyen-Orient.
La droite pour sa part continue, à l’encontre de tout pragmatisme politique, d’assimiler la guerre menée par les israéliens à celle qui devrait être lancée en France contre les zones de non droit et la criminalité allogène…
Aux racines du chaos ethnique et sécuritaire
Les mouvements de droites, leurs militants et adhérents devraient comprendre depuis fort longtemps que la violence communautaire et l’insécurité omniprésente qui minent la France ne découlent pas de l’origine des immigrés, et encore moins de l’Islam qui en plus de sa doctrine religieuse comprend un code de conduite particulièrement rigoureux, mais bien du système occidental.
L’anomie, le cosmopolitisme, le « droit de l’hommisme », l’individualisme, l’accumulation d’argent comme seules perspectives sont à la racine du mal occidental, et les criminels immigrés auront toujours pour référence 2pac et non un fedayin…
La position actuelle de la droite française face à l’Iran : ignorance et confusion
Un autre élément marquant de cette évolution est l’hostilité grandissante de la droite française envers l’Iran, aujourd’hui perçu comme un « ennemi ». Ce changement est d’autant plus paradoxal que l’Iran n’a jamais menacé la France et a même été un acteur clé dans la lutte contre le djihadisme, notamment contre Daesh. Pourtant, dans le discours de la droite moderne, l’Iran est régulièrement associé à l’axe du « mal islamique ».
Ce discours unilatéral occulte là encore les complexités géopolitiques et les luttes régionales dans lesquelles l’Iran joue un rôle important, notamment en soutenant des groupes qui s’opposent aux forces djihadistes. La diabolisation de l’Iran fait ainsi partie de la logique de soutien inconditionnel à Israël, perçu comme le rempart contre les menaces issues du Moyen-Orient.
En réalité, l’Iran et la Syrie – tout comme autrefois l’Irak et la Libye – forment des remparts inébranlables face aux idéologies islamistes les plus radicales. Le positionnement hostile d’une grande partie de la droite française (qui rejoint celui du gouvernement en place) relève ainsi de l’ignorance la plus absolue quant aux forces en présence au Moyen-Orient.
Au-delà des opposition ontologiques qui existent entre le régime iranien et l’idéologie djihadiste, la destruction de la Libye en 2011 illustre les conséquence de toute déstabilisation de régime dans cette région du monde. Cela devrait suffire à réorienter la droite en lui faisant privilégier la realpolitik aux prises de positions épidermiques et émotives ; nous en sommes hélas très loin.
Vers une indépendance de pensée et de politique en Europe face au sionisme
En conclusion, il apparaît crucial pour la France et pour l’Europe de s’attacher à résoudre en priorité leurs propres problématiques sociales, économiques et culturelles. L’alignement idéologique sur des États étrangers et le soutien inconditionnel à des groupes d’influence particuliers compromettent la liberté de décision et la souveraineté de l’Union Européenne.
De même, l’adhésion aveugle à des dogmes politico-religieux extérieurs ne peut que porter atteinte aux intérêts d’un futur Etat européen libre et rayonnant, qui devra nécessairement coopérer avec le monde arabo musulman, ne serait-ce que pour résoudre la problématique de l’immigration de masse.
Plutôt que de s’engager dans des alliances automatiques, les nations européennes gagneraient à se concentrer sur une diplomatie équilibrée et sur la résolution de leurs défis internes, notamment la question démographique. Or ces problématiques sont en partie liées à la situation internationale : en soutenant des puissances agressives et impérialistes au Moyen-Orient, qu’il s’agisse d’Israël ou des Etats-Unis, l’Europe porte non seulement atteinte aux populations de cette région, mais également aux européens eux-mêmes.
La destruction de la Jamahiriya libyenne et le soutien apporté par la France aux « printemps arabes » a ainsi contribué au regain de l’activité terroriste et à de nouvelles vagues migratoires à destination du vieux continent. Une leçon à retenir, pour une droite qui à la mémoire courte…
[1] Libération, « malaise après un appel contre le racisme anti-blanc », 26 mars 2005 (en ligne)
[2] https://www.terreetpeuple.com/chroniques-par-pierre-vial/15-gaulois-et-juifs-la-paix-des-braves.html